Lettre d’Adèle Foucher à Victor Hugo du 13 avril 1822

Adèle Foucher, âgée de 18 ans, écrit à son fiancé Victor Hugo, âgé de 20 ans.

Leur mariage sera célébré le 12 octobre 1822 à Paris, dans la chapelle de la Vierge à l’église Saint-Sulpice.

«CE NE SERA QUE PAR TON TRAVAIL QUE J’ACHÈTERAI LE BONHEUR »Nous avons là un exemple de ce qu’est le sort d’une jeune bourgeoise au XIXe siècle :  partager les tâches ménagères avec sa mère et plus tard assister son mari dans son travail, cette dernière occupation étant souhaitée par Adèle comme l’obtention du bonheur. Une fois mariée, Adèle connaîtra trop de grossesses successives pour pouvoir se livrer à cette tâche : elle ne servira pas de copiste à son mari comme plus tard la maîtresse de celui-ci, Juliette Drouet. Le désir de s’affirmer et de faire œuvre personnelle, Adèle l’éprouvera et le comblera des années après dans la biographie qu’elle publiera sous le titre Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie mais sans signer le livre, remanié par ses fils et Auguste Vacquerie, ami de la famille. Justice sera rendue à l’auteure,  plus d’un siècle après, en 1985, pour le centenaire de la mort de Hugo : le  texte de celle-ci lui sera enfin attribué, et publié sous le titre Victor Hugo raconté par Adèle Hugo.

© Danièle Gasiglia-Laster

Vidéo avec un extrait de cette lettre interprétée par une membre de la Société des Amis de Victor Hugo.

Adèle à V.H., le 13 avril 1822

« Il t’a semblé que j’étais triste, à Gentilly ; j’étais seulement heureuse ; j’étais aussi chagrine quand je pensais que tu allais t’en aller seul dans ta tour. Je crois que le seul moyen de supporter cette séparation est de travailler, de penser que ce même travail amènera le bonheur. Je voudrais pouvoir partager tes travaux, mais je n’ai pas même cette jouissance ; que je reste dans l’inaction ou que je m’occupe, cela n’avance à rien. Plains-moi, mon ami, de te sentir passer ta vie dans le travail, et de n’être, moi, qu’une espèce de paresseuse. Il est vrai, j’aide maman dans le ménage, je la soulage, et je me plains ! Ne devrais-je pas me trouver heureuse d’être de moitié dans ses actions ? Non, ce sont les tiennes que je veux partager, celles de mon mari, de mon ami. Ce ne sera que par ton travail que j’achèterai mon bonheur. Dis-moi, puis-je te servir à quelque chose ? »

Sélection de lettres entre Victor Hugo et Adèle Foucher en 1822