Le 28 août 1824 à Paris naissait le deuxième enfant d’Adèle Foucher et de Victor Hugo
Il y a deux cents ans, au 90 rue de Vaugirard, venait au monde Léopoldine Hugo, deuxième enfant du couple Hugo. Le premier, Léopold, était mort à quelques mois et les parents aimaient à croire que l’âme du défunt était réapparue dans le corps de cette petite fille. Léopoldine fut très aimée de ses parents.
En l’absence de Victor, parti à Reims pour le couronnement de Charles X, Adèle séjourne à Blois, chez le père et la belle-mère de son mari, et elle lui écrit régulièrement pour lui donner des nouvelles de leur chère Didine. Le 21 mai 1825 elle l’informe que leur fille a fait sa première dent : « et ce qu’il y a d’heureux c’est qu’elle se porte à merveille, cette nouvelle te fera plaisir mon aimé, nous aimons tant notre Didine ! » Dans une lettre à Saint-Valry du 11 octobre 1826, Victor écrit « Didine parle mieux que moi. »
Le 3 septembre 1837 – elle a 13 ans -, il est à Etaples, près de Boulogne-sur-Mer et il adresse ces mots à sa Léopoldine bien-aimée : « Je viens de me promener au bord de la mer en pensant à toi, mon pauvre petit ange. J’ai cueilli pour toi cette fleur dans la dune. C’est une pensée sauvage qu’a arrosée plus d’une fois l’écume de l’océan. Garde la pour l’amour de ton petit père qui t’aime tant. […] Et puis, mon ange, j’ai tracé ton nom sur le sable : DIDI. La vague de la mer l’effacera cette nuit, mais ce que rien n’effacera, c’est l’amour que ton père a pour toi ». Des années après, en pensant à la disparue, en 1855, il écrira un poème inspiré par le même moment : « J’ai cueilli cette fleur pour toi, sur la colline… » (Les Contemplations).
Toujours dans Les Contemplations, sorte de mausolée littéraire pour Léopoldine, il se souvient des jours heureux et de l’enfant radieuse qu’elle avait été.
Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin
De venir dans ma chambre un peu chaque matin ;
Je l’attendais ainsi qu’un rayon qu’on espère ;
Elle entrait et disait : Bonjour, mon petit père ;
Prenait ma plume, ouvrait mes livres, s’asseyait
Sur mon lit, dérangeait mes papiers, et riait,
Puis soudain s’en allait comme un oiseau qui passe.
Alors, je reprenais, la tête un peu moins lasse,
Mon œuvre interrompue, et, tout en écrivant,
Parmi mes manuscrits je rencontrais souvent
Quelque arabesque folle et qu’elle avait tracée,
Et mainte page blanche entre ses mains froissée
Où, je ne sais comment, venaient mes plus doux vers.
Elle aimait Dieu, les fleurs, les astres, les prés verts,
Et c’était un esprit avant d’être une femme.
Son regard reflétait la clarté de son âme…
Dans Les Misérables, la poupée que Jean Valjean achète pour Cosette est prénommée par celle-ci Catherine, un des prénoms de Léopoldine.
Une vague a emporté un jour Léopoldine mais l’amour de son père lui est demeuré, « au bord de l’infini », infiniment.